L’impact de la COVID-19 sur l’évaluation d’entreprises

La situation actuelle a évidemment des impacts sur la valeur des entreprises. La plupart des entreprises sont touchées sévèrement, mais il y a aussi des entreprises qui ont vu la demande pour leurs produits et services augmenter de façon importante. Dans un cas comme dans l’autre, la situation était imprévisible, elle sera temporaire et le futur à court terme demeure flou et incertain.

Quotidiennement, notre équipe s’informe de la situation et des impacts sur notre travail d’évaluation. Dans les paragraphes qui suivent, nous vous partageons certaines observations et réflexions que nous avons recueillies au cours des dernières semaines.

L’incertitude : L’évaluation d’entreprises n’est pas une science exacte et elle comporte toujours une part d’incertitude. La présente crise sanitaire et économique accentue le niveau d’incertitude en raison, entre autres, de la volatilité des marchés des capitaux, de la durée de la crise et de la reprise qui s’en suivra ainsi que des données financières à utiliser dans nos modèles d’évaluation. On se retrouve dans une situation exceptionnelle et historique difficilement comparable avec les crises économiques passées.

La date d’évaluation : Dans certains contextes, tels qu’une planification successorale, un conflit matrimonial ou entre actionnaires, le choix de la date d’évaluation aura un impact important et deviendra une source de débat.

Multiples d’évaluation : Il est probable qu’on observe une baisse des multiples d’évaluation. On peut s’attendre à ce que les investisseurs en équité exigent des rendements plus élevés sur leurs investissements. Malgré la baisse des taux d’intérêt, les banques pourraient resserrer les conditions de crédit pour les nouveaux projets ce qui rendra plus difficile l’accès aux capitaux. Les perspectives de croissance à court terme sont affectées. On constate également que certaines entreprises qui sont considérées essentielles s’en sortent mieux en situation de crise.

Les méthodes d’évaluation : Avant la crise, la méthode de la capitalisation était la méthode la plus fréquemment utilisée. Maintenant, la méthode de l’actualisation des flux monétaires (DCF) devrait être privilégiée afin de tenir compte de la récession et de la reprise. Les entreprises devraient même avoir plusieurs scénarios de prévisions financières. Il est fort probable également qu’un plus grand nombre d’entreprises devront être évaluées à l’aide d’une approche en liquidation plutôt qu’en continuité d’exploitation.

En terminant, il est primordial de bien comprendre l’entreprise évaluée, ses risques, son modèle d’affaires, son environnement interne et externe et ses perspectives de profitabilité. Tout devra être remis en question et analysé avec rigueur: le choix de la méthode d’évaluation, l’appréciation des budgets et prévisions financières, les investissements futurs en immobilisations, les multiples, la structure en capital et le fonds de roulement.

La valeur d’une entreprise

Depuis quelques années, on constate un nombre croissant de transferts d’entreprises et la tendance va s’accentuer dans les prochaines années. Dans ce contexte, il est inutile de rappeler l’importance de bien comprendre la valeur d’une entreprise et les facteurs qui l’influencent.

D’entrée de jeu, il faut savoir que la valeur d’une entreprise se décline en trois (3) composantes :

– Le fonds de roulement (comptes clients + inventaire – comptes fournisseurs);

– Les immobilisations corporelles; et

– L’achalandage (« goodwill »).

Le fonds de roulement et les immobilisations sont des investissements nécessaires dans l’entreprise pour générer des ventes et qui auront généralement un impact dollar pour dollar sur la valeur d’entreprise. Ce sont rarement des actifs qui permettent à l’entreprise de se démarquer et d’attirer l’attention des acquéreurs.

Ce qui a de la valeur aux yeux des acquéreurs c’est la capacité de l’entreprise à optimiser l’utilisation de son fonds de roulement et de ses immobilisations et à développer des avantages concurrentiels avec son capital humain, les relations avec ses clients, ses fournisseurs et autres partenaires, sa structure organisationnelle et sa capacité à innover.

Lorsque l’on retrouve l’un ou plusieurs de ces éléments de succès dans une entreprise, on y retrouve aussi généralement de l’achalandage et c’est cet actif que l’entreprise doit chercher à valoriser.

Il est important de mentionner que la valeur d’entreprise ne correspond pas à la valeur des actions de l’entreprise. Pour établir la valeur des actions, il faut tenir compte de la trésorerie, des actifs excédentaires et de la dette.

Facteurs qui influencent la valeur d’entreprise et l’achalandage

Au centre de chaque valeur d’entreprise, on retrouve les éléments suivants :

– Les flux monétaires futurs (les profits);

– La croissance anticipée des flux monétaires; et

– Le risque associé à la réalisation des flux monétaires (taux de rendement / multiples).

Chacun de ces éléments pourrait faire l’objet d’un article tellement ils sont importants dans la valorisation d’une entreprise. Les propriétaires et les dirigeants devraient toujours les considérer dans la gestion des activités courantes et dans les projets d’investissement, afin de prendre des décisions optimales pour la valeur de l’entreprise. Mieux vaut ne pas attendre d’être en mode vente pour le faire parce qu’il est généralement trop tard pour en maximiser l’impact sur la valeur.

Que vous soyez un acquéreur ou un vendeur, ne négligez pas l’importance d’une analyse approfondie de la valeur avec l’aide de professionnels expérimentés et compétents. Si vous maitrisez bien les facteurs qui ont un impact sur la valeur d’une entreprise, vous serez en meilleure position pour négocier et vous augmenterez vos chances de conclure une transaction avec succès.

Évaluation d’une entreprise familiale (aspects pratiques)

Introduction

Il existe diverses approches et méthodes d’évaluation, lesquelles s’appliquent autant aux entreprises familiales qu’aux autres types d’entreprises. Traditionnellement, la valeur d’une entreprise est fondée sur la rentabilité qu’elle génère ou est fondée sur la valeur des actifs qui la compose.

L’approche basée sur la rentabilité est utilisée dans un contexte de continuité d’exploitation, où l’on présume que l’entreprise pourra poursuivre ses activités tout en ayant la possibilité d’accroître ses bénéfices, tandis que l’approche fondée sur la valeur des actifs est généralement utilisée lorsque l’entreprise ne procure pas à ses actionnaires un rendement suffisant sur le capital investi. Le rendement requis dépend notamment des risques associés au secteur et de l’entreprise à évaluer.

Méthodes basées sur la valeur des actifs

Valeur des actifs nets redressés : La méthode des actifs nets redressés est utilisée pour évaluer les sociétés de gestion parfois détentrices des actions de l’entreprise familiale opérante. Cette méthode implique que chaque élément d’actif ou de passif inscrit aux livres doit être redressé, afin de refléter sa juste valeur marchande à la date d’évaluation. Les placements dans des sociétés opérantes rentables sont évalués selon les méthodes basées sur la rentabilité, tandis que les autres sont évalués à leur valeur de réalisation nette, soit après la considération des impôts latents.

Valeur de liquidation : Lorsqu’une entreprise familiale n’est pas rentable ou n’offre pas un rendement suffisant, le prix le plus élevé (juste valeur marchande) correspond à sa valeur de liquidation. Cette méthode consiste à déterminer le montant net que réaliseront les actionnaires après la disposition des actifs et le paiement de tous les passifs. La valeur de réalisation tient compte des frais associés à la disposition (commissions, honoraires, etc.) et des impôts payables par la société. Les frais encourus durant la période de liquidation, les indemnités de cessation d’emploi et les pénalités pour mettre fin au bail, doivent également être pris en compte dans ce calcul.

Méthodes basées sur la rentabilité

Dans la présente section, nous nous limiterons aux méthodes d’évaluation basées sur la rentabilité les plus fréquemment utilisées pour évaluer les entreprises familiales, soit celle de la capitalisation des bénéfices nets normalisés et celle de la capitalisation des flux monétaires nets discrétionnaires (revenant aux actionnaires).

Capitalisation des bénéfices nets normalisés : Cette méthode implique la détermination des bénéfices nets normalisés et la capitalisation de ceux-ci à un taux (multiple) approprié. Les actifs excédentaires, soit ceux qui ne sont pas nécessaires à l’exploitation, sont ajoutés à leur valeur de réalisation nette. Cette approche s’appuie sur l’hypothèse qu’un vendeur pourrait sortir ces actifs avant de vendre l’entreprise familiale ou exigerait une compensation.

Capitalisation des flux monétaires nets discrétionnaires : Cette méthode est utilisée lorsqu’il existe des écarts importants entre l’amortissement et le niveau de réinvestissement annuel nécessaire pour maintenir les opérations de l’entreprise familiale. Cette méthode se différencie de la précédente par l’utilisation de flux monétaires au lieu de bénéfices et par le traitement des impôts. Selon cette méthode, la valeur actualisée des économies d’impôts sur la fraction non amortie du coût en capital (FNACC) disponible à la date de l’évaluation est ajoutée à la valeur capitalisée afin de compenser pour l’impôt calculé sur les flux monétaires au lieu des bénéfices.

Étape 1 : Détermination des bénéfices nets normalisés / flux monétaires nets discrétionnaires : Dans la détermination des bénéfices nets normalisés / flux monétaires nets discrétionnaires d’une entreprise familiale, outre les dépenses non récurrentes, la rémunération de la direction doit souvent être ajustée afin de refléter la rémunération qu’un acquéreur devrait payer sur le marché pour des fonctions similaires puisque leur rémunération comporte généralement plusieurs éléments, tels que le salaire de base, les bonis, les dividendes et les comptes de dépenses discrétionnaires. De plus, plusieurs entreprises familiales assument les assurances sur la vie des actionnaires dirigeants. Lorsque c’est le cas, ces dépenses doivent être éliminées des bénéfices nets normalisés / flux monétaires nets discrétionnaires puisqu’il s’agit d’une dépense discrétionnaire.

Étape 2 : Détermination du taux de rendement (multiple) : Les multiples des bénéfices (flux monétaires) sont déterminés en utilisant, comme point de départ, les taux de rendement sur des placements peu risqués (ex. : Obligation du Canada à long terme). Par la suite, l’évaluateur doit additionner au taux de rendement sans risque, plusieurs primes de risques pour en arriver à un taux de rendement global qu’un investisseur prudent devrait exiger en investissant dans l’entreprise familiale. Ces dernières se composent d’une prime de risque reliée à : la détention d’une participation en actions dans l’entreprise, la taille de l’entreprise et une prime de risque spécifique à l’entreprise (risque relié à la concurrence, à la clientèle, au marché, à la main-d’œuvre, à la réglementation, etc.).

Les multiples de sociétés ouvertes du même secteur d’activité peuvent être utilisés pour déterminer les multiples applicables aux bénéfices (flux monétaires) de l’entreprise à évaluer. Toutefois, leur usage nécessite un ajustement pour tenir compte du fait qu’il y a des différences importantes entre les entreprises publiques dites comparables et l’entreprise familiale évaluée.

Problèmes particuliers d’évaluation d’une entreprise familiale

Personne clé : Dans une entreprise familiale, le succès est souvent directement attribuable aux efforts d’une personne clé à la fois dirigeante et propriétaire. Cette personne travaille généralement dans un domaine d’activité très spécialisé qui requiert de l’expérience, cumule plusieurs postes au sein de l’entreprise ou entretient une relation de confiance avec ses clients.

Sur le plan de l’évaluation, l’impact d’une telle personne peut être reflété au moyen d’un escompte appliqué sur la valeur globale des actions de l’entreprise, d’un ajustement aux bénéfices nets normalisés / flux monétaires nets discrétionnaires ou d’un ajustement aux multiples.

L’importance de la personne clé dépend, entre autres :

– De la possibilité de trouver une autre personne capable d’assumer éventuellement les responsabilités de la personne clé et du temps nécessaire pour y arriver; et

– De la rémunération versée à la personne clé et celle qui devrait être versée à son remplaçant.

Enfin, plusieurs études sur la question ont été réalisées depuis les années ’70. Il en ressort que l’escompte pour personne clé a diminué de façon constante et qu’il se situe dans l’intervalle de 5 % à 10 % de nos jours. La cause possible de cette diminution est que les petites entreprises familiales auraient depuis lors accru leur capacité a maintenir leurs habilités de gestion.

Convention entre actionnaires : Les membres de la famille qui possèdent des actions ont souvent convenu d’une convention. Des difficultés d’interprétation amènent des problèmes d’évaluation des actions.

a) Les clauses relatives à l’évaluation ou à la fixation du prix des actions peuvent désavantager l’une des parties au moment d’une transaction. L’utilisation d’une formule préétablie peut ne pas convenir aux circonstances et peut, par conséquent, sur ou sous évaluer l’entreprise.

b) La définition du prix ou de la valeur proposée dans la convention peut amener des difficultés d’interprétation. Lorsque le terme « juste valeur marchande » est utilisé, il faut normalement, au moment d’évaluer une participation minoritaire, tenir compte de la possibilité d’appliquer des escomptes de participation minoritaire ou de faible négociabilité.

Lorsqu’il est aux prises avec de tels problèmes, l’évaluateur doit-il tenir compte de la convention d’actionnaires pour évaluer l’entreprise familiale?

Du point de vue fiscal, la circulaire d’information 89-3 précise les conditions pour qu’une convention entre actionnaires soit jugée déterminante pour établir la valeur des actions lorsque cette convention lie des parties ayant entre elles un lien de dépendance, soit :

« Le prix fixé dans la convention ou qui est calculé selon la formule donnée dans celle-ci constitue une partie suffisante et complète et correspond à la juste valeur marchande des actions déterminée indépendamment de la convention au moment de la signature de celle-ci. »

Participations minoritaires : Dans une entreprise familiale, on retrouve fréquemment des actionnaires qui détiennent des participations minoritaires. Dans l’évaluation de telles participations, il est reconnu de considérer un escompte sur la valeur au prorata.

Pour quantifier (de façon subjective) l’escompte minoritaire, il faut tenir compte, entre autres, de la taille de la participation minoritaire, du degré de dispersion du capital-actions, de la présence possible d’acheteurs sur le marché pour acquérir cette participation minoritaire, du degré d’influence de l’actionnaire minoritaire, etc.

Les tribunaux canadiens se sont penchés sur le problème de la moins-value des participations minoritaires dans un grand nombre de causes où il y avait un contrôle exercé par un groupe ou une famille. Dans de telles situations, il n’existe aucune constance (ex. : un taux systématique de 30 %) dans la quantification de l’escompte.

Du côté des autorités fiscales, lorsqu’on reconnaît qu’une famille contrôle la corporation, une évaluation proportionnelle pour les actions de chaque membre du groupe familial est utilisée. La circulaire d’information 89-3 traite en détail de la question du contrôle par un groupe familial.

Conclusion

L’entreprise familiale doit être évaluée en tenant compte de ses particularités, en exerçant un jugement professionnel et en s’appuyant sur le gros bon sens. Un effort raisonnable doit être effectué pour appuyer la juste valeur marchande utilisée pour transiger puisqu’il est possible que les autorités fiscales révisent la transaction.

Combien vaut votre entreprise ?

« Quelle est la valeur de mon entreprise? » C’est une question couramment posée par beaucoup de propriétaires d’entreprises et pour bon nombre de raisons. Que vous désiriez acheter, vendre ou fusionner une entreprise dans n’importe quel secteur d’activité, il est important d’en connaître d’abord la valeur marchande, sans la sous-estimer ni la surestimer. Il faut savoir précisément combien elle représente sur le marché actuel. Cela vous permettra de supporter la valeur et vous placera en bien meilleure position pour négocier.

L’évaluation d’une entreprise n’est pas une science exacte. Dans ce contexte, il est impossible d’obtenir l’exactitude mathématique puisqu’il n’y a pas de formules simples ou généralement reconnues qui soient acceptables pour déterminer la valeur d’une entreprise.

La valeur d’une entreprise est plutôt déterminée en fonction de ses bénéfices passés et de son potentiel futur, de la valeur de ses actifs nets, de la valeur d’entreprises publiques œuvrant dans le secteur, des conditions de l’industrie, etc.

Il existe trois approches et plusieurs méthodes pour évaluer les actions d’une entreprise. Nous résumons ces approches et les principales méthodes dans le graphique suivant :

Comme nous pouvons le constater, il existe diverses approches d’évaluation pour évaluer une entreprise. Traditionnellement, la valeur d’une entreprise est fondée sur la rentabilité qu’elle génère ou sur la valeur des actifs qui la compose. L’approche basée sur la rentabilité est utilisée dans un contexte de continuité d’exploitation où l’on présume que l’entreprise pourra poursuivre ses activités tout en ayant la possibilité d’accroître ses bénéfices tandis que l’approche fondée sur la valeur des actifs est généralement utilisée lorsque l’entreprise ne procure pas à ses actionnaires un rendement suffisant sur le capital investi. Le rendement requis dépend notamment des risques associés au secteur et de l’entreprise à évaluer.

Il existe une troisième alternative, soit l’approche fondée sur le marché (sociétés comparables ou transactions sur le marché). Toutefois, compte tenu qu’il est très difficile d’obtenir de l’information financière précise au sujet de transactions comparables, puisque cette information est généralement tenue confidentielle, cette approche est difficile d’application et elle s’avère davantage utilisée afin de comparer la « raisonnabilité » des résultats obtenus avec d’autres approches.

Lorsque l’approche a été choisie, l’évaluateur doit alors définir la méthode d’évaluation appropriée selon l’entreprise évaluée. Par exemple, la méthode de la capitalisation du bénéfice net représentatif peut être utilisée sous l’approche basée sur la rentabilité, tandis que la méthode de l’actif net redressé peut être utilisée sous l’approche fondée sur la valeur des actifs. Il existe plusieurs méthodes applicables à chaque approche d’évaluation et une bonne analyse de la nature et de l’évolution des activités d’une entreprise amènera l’évaluateur à appliquer la méthode d’évaluation appropriée.

L’évaluation est avant tout une question de jugement et de point de vue. L’approche à adopter et les méthodes d’évaluation appropriées varient selon chaque situation. Bien qu’il existe des formules variées pour évaluer des entreprises, la raisonnabilité du résultat obtenu demeure une des qualités principales d’une bonne évaluation. En effet, une bonne évaluation s’appuyant sur le gros bon sens et bien supportée aide toujours à convaincre.

L’incorporation des professionnels

Qu’en est-il de la juste valeur marchande de la pratique professionnelle qui y sera transférée?

Avec l’adoption de la « Loi modifiant le Code des professions et d’autres dispositions législatives concernant l’exercice des activités professionnelles au sein d’une société », le gouvernement du Québec permettait ainsi aux ordres professionnels d’autoriser leurs membres à exercer leurs activités professionnelles par l’entremise d’une société par actions. Le transfert des activités d’un professionnel ou des activités professionnelles d’une société en nom collectif à une société par actions, i.e. l’incorporation, doit se planifier avec soin et une des principales étapes du processus est d’établir la juste valeur marchande de la pratique professionnelle qui y sera transférée.

Quels sont les facteurs qui rendent les pratiques professionnelles si uniques et qui influencent leur juste valeur marchande?

– D’abord, les pratiques professionnelles sont des entreprises de services. Elles ne fabriquent pas ou ne vendent pas de produit tangible. Le capital humain demeure leur principal actif. Ainsi, une large partie des actifs transférés sont, par nature, des actifs incorporels.

– La plupart des praticiens professionnels détiennent une ou plusieurs licences émises par des ordres professionnels. Normalement, les pratiques professionnelles ne peuvent être vendues qu’à un autre professionnel membre de la même corporation. Ainsi, le nombre d’acheteurs potentiels est donc limité à des professionnels qui ont la même formation, expertise et expérience.

– La valeur d’une pratique professionnelle dépend des habiletés, de la réputation et des efforts individuels des praticiens professionnels. Ainsi, cette portion de la valeur d’une pratique professionnelle peut ne pas être facilement transférable à un acheteur potentiel. Cette portion de la juste valeur marchande est connue comme étant de l’achalandage personnel ou professionnel et est basée sur le fait que les clients viennent à l’établissement principalement pour voir le professionnel. Ceci sous-entend que si le praticien quitte pour une autre pratique professionnelle, les clients vont suivre le praticien.

– L’achalandage commercial, de son côté, provient du succès des opérations de la pratique professionnelle et est associé à l’entité. L’achalandage commercial est souvent une composante importante de la valeur d’une pratique professionnelle.
Cet achalandage est basé sur le fait que les clients ne sont pas rattachés qu’aux habilités spécifiques du professionnel, mais aussi à la location de la pratique, au personnel en place, au numéro de téléphone, à l’état des locaux et des équipements, à la réputation de la firme, etc. Dans de tels cas, les clients vont continuer à venir à la pratique professionnelle en dépit du changement de propriétaire.

– Enfin, plus que n’importe quel autre type d’entreprise, la nature des clients tend à différencier les valeurs des pratiques professionnelles par rapport à une autre. Dans la plupart des cas, la valeur de la pratique professionnelle résulte des clients existants, du potentiel à les retenir et de la capacité d’en attirer d’autres.

Survol des approches et méthodes d’évaluation les plus courantes

On dit souvent que l’évaluation s’apparente plus à l’art qu’à la science. Ainsi, l’évaluation d’une pratique professionnelle n’est pas une science exacte et il n’existe pas de formules applicables à tous les types de pratiques professionnelles. L’approche à adopter et les méthodes d’évaluation appropriées varient selon chaque situation. L’évaluation est avant tout une question de jugement et de point de vue.

En général, comme la valeur des pratiques professionnelles se retrouve souvent sous forme d’actifs intangibles (ex : capital humain, liste de clients, etc.) ces éléments, qui font partie de la valeur de la pratique professionnelle, tendent à disparaître sous la prémisse de la valeur de liquidation. Ainsi, l’approche pour évaluer les pratiques professionnelles devrait plutôt se baser sur la continuité d’exploitation (qui inclut, entre autres, la méthode basée sur la capitalisation des bénéfices nets) par opposition à la méthode de la liquidation.

D’autres méthodes d’évaluation sont aussi couramment utilisées. Il s’agit de méthodes basées sur le marché ou de règles de pouce. Ces règles de pouce sont issues de transactions survenues dans l’industrie. Cependant, ces règles de pouce ne fournissent qu’une approximation de la valeur et ne devraient pas être utilisées comme seule méthode d’évaluation puisque souvent la valeur estimée avec ces règles a tendance à être plus élevée qu’elle ne devrait l’être. Par exemple, une règle de pouce commune pour les firmes comptables est que la valeur de la pratique équivaut à environ une année de revenus. Cependant, lorsque nous analysons les transactions plus en profondeur, il n’est pas rare de constater que cette « année de revenus » est payée au vendeur sur une certaine période de temps et est souvent sans intérêt. De plus, le calcul est souvent basé seulement sur les revenus des clients qui ont été retenus suite à la vente. Dans ces cas, la valeur au comptant équivalente est considérablement moindre que la règle de pouce.

Conclusion

Ces quelques notions de base vous permettront de travailler activement avec votre conseiller financier dans les étapes d’incorporation de votre pratique professionnelle. Il faut toujours garder à l’esprit que cette dernière doit être évaluée en tenant compte de ses particularités, en exerçant un jugement professionnel et en s’appuyant sur le gros bon sens.